A 34 ans, Eric Barone fait une entrée remarquée dans le monde du VTT de descente. Après seulement 8 compétitions, il entre en équipe de France et devient Champion de France, d’Europe et du Monde la même année. Depuis bientôt 3 décennies, celui que la presse spécialisée baptise « le Baron Rouge » manage d’ambitieux projets de records du monde de vitesse à vélo sur neige et terre, en France et à l’international. Il ajoute aujourd’hui une ligne supplémentaire à son palmarès en créant une nouvelle discipline qui mêle descente à VTT sur sol enneigé avec des virages : le Snow Bike. Intitulés « Kepax Snow Bike », les premiers championnats de France FFC se tiendront les 5 et 6 mars à Pra Loup. Rencontre.

 

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Bonjour Eric ! Cet hiver, nous vous accompagnons pour les championnats de France KEPAX Snow Bike. Une discipline que vous avez créée, racontez-nous la génèse de ce projet.

L’ADN de la discipline est né grâce à des événements de vélo sur neige avec virages dans le but de rechercher mon remplaçant en vitesse sur neige… Dans un premier temps, j’ai trouvé quelques personnes qui étaient intéressées mais ne sont pas allées au bout… Ce sont des projets compliqués, entrepreneuriaux et lourds qui nécessitent d’avoir ses propres équipes : partir du sommet de la montagne est une chose, battre des records en est une autre ! La révélation s’est produite à Val d’Isère en 2016 où j’ai obtenu l’autorisation de fermer une partie de la descente Dames d’une coupe du monde : je me suis rendu compte qu’il y avait peut-être une discipline à créer. J’ai alors commencé à créer des projets d’événements officieux, la fédération française de cyclisme était d’accord pour me suivre en observatrice. Finalement, en 2018, après plusieurs phases de tests, je me suis rapproché de l’UCI (Union Cycliste Internationale), qui a approuvé la discipline.

Vous avez longtemps été sous le feu des projecteurs, avec de nombreux records du monde notamment. Aujourd’hui plus en retrait pour imaginer et organiser cette nouvelle discipline, qu’est-ce qui vous a motivé et quel est son fonctionnement ? 

Ne plus être sur le devant de la scène, c’est certain ! Mais je continue de piloter par plaisir. Je voulais créer un nouveau terrain de jeu à vélo. La discipline Alpine Snow Bike (qui sera renommée « Snow Bike » par l’UCI le 1er janvier 2022) comprendra trois activités : l’activité de descente par la gravité, l’activité de randonnée nordique en vélo à assistance électrique et l’activité enfants par un jardin des neiges.
La partie compétition est inspirée du ski alpin, Super G ou descente, mais à vélo, avec des pneus cloutés car l’idée est bien de rouler sur une neige dure avec un chrono pour désigner le vainqueur. Le départ se fait par vague de deux, ce qui rend la discipline très spectaculaire.
La partie randonnée nordique se fait avec un VTT « fatbike » à grosses roues, sur lesquelles on dépose une chaussette anti-glisse, ce qui permet surtout de rassurer le client. Et pour les enfants, des draisiennes (vélos sans pédales) seront à disposition sur un espace dédié.

Lors des prochains championnats KEPAX Snow Bike, la catégorie reine sera la descente. Mais il y aura aussi d’autres activités pour les néophytes ? 

Oui, lors des championnats, il y aura bien sûr la partie descente pour la compétition. Mais aussi des espaces « test VAE FAT » et « randonnée nordique », ainsi qu’un jardin des neiges dédié aux enfants, où des draisiennes seront à disposition.

D’un point de vue technique et matériel, qu’est-ce qu’il faut pour pratiquer cette discipline ? 

Pour l’instant, il n’y a pas de VTT spécifiques puisque c’est un marché naissant. On utilise surtout les VTT de descente ou d’enduro, voire crosscountry. Mais il vaut mieux avoir un VTT tout suspendu (amortisseur à l’arrière et à l’avant), c’est certain. Les pratiquants actuels sont des personnes qui font du VTT ou du ski, ce sont eux la cible ! Le Snow Bike réunit généralement des personnes qui veulent s’amuser, s’essayer à la descente sur neige et qui posent plein de questions. L’on se rend vite compte que, sur neige, le risque est moins important, la chute est plus douce… Tout va plus vite, on grip et on glisse ! Par rapport à la terre, le pilotage demande de la finesse dans les grandes courbes… C’est très ludique, le plaisir est garanti, c’est fun, c’est aussi pour ça que la discipline a été créée ! Toutefois, un court apprentissage est nécessaire pour sentir les réactions du vélo et découvrir le grip et la glisse associée sur neige en virage ou lors des freinages.

Nous avons évoqué l’accord de l’UCI en 2018… Comment cela s’est concrétisé depuis cette date ? 

Depuis l’approbation, j’ai organisé deux à trois événements par hiver pour comprendre, ouvrir un marché, et voir s’il y avait un potentiel de participants. Au début, j’avais 7 participants et à la fin j’arrivais entre 50 et 70. Donc, il y a quelque chose à faire, c’est certain !
Puis, il y a eu la pandémie, donc un temps mort pour tout le monde, les stations de ski étant fermées.
Aujourd’hui, c’est avec beaucoup d’enthousiasme que l’on met en place ce premier événement planétaire, qui a lieu en France, et qui est le premier championnat de France FFC (Fédération Française de Cyclisme).
Je pense que c’est une discipline qui intéresse l’UCI car cette organisation n’est pas encore représentée l’hiver. Avec le Snow Bike, elle peut développer une coupe du monde, la présenter en 2023 et peut avoir une vision olympique dans 10-15 ans, pourquoi pas ! En tous les cas, l’idée est de proposer au CIO de réaliser une expérience démonstrative avec quelques pilotes pour les jeux olympiques de Milan qui auront lieu en 2026.

Comment va se dérouler cette compétition sur deux jours ? 

C’est un format sur deux matinées, car à vélo on roule mieux le matin que l’après-midi, la neige étant plus dure.
Le jour 1 débutera par un entrainement pour tous les participants, ils pourront faire plusieurs descentes, contrairement aux départs de mass start par exemple, avec 200 participants qui partent tous de front. Ici, les pilotes pourront descendre plusieurs fois, prendre leurs repères.
Puis à 11h, une manche de qualification permettra de starter le départ du lendemain.
Le jour 2 débute aussi par un entrainement puis la compétition démarre, sur deux manches, et le meilleur chrono de ces deux manches l’emporte ! La compétition est ouverte à toutes et tous. Cette première édition devrait regrouper entre 50 et 100 participants, un premier maillot officiel sera décerné au champion de France.

Après ce premier événement, quelles sont vos ambitions concernant cette discipline, votre vision de développement ?

Selon moi, l’hiver s’ouvre à de nouvelles choses et est un terrain de jeu propice à de nouvelles activités qui se développent aujourd’hui. Trente ans plus tôt, c’était le mono-ski, puis le snowboard… Depuis quelques années, grâce aux vélos à assistance électrique, l’on voit arriver des vélos sur neige pour la randonnée, quelques descentes en mass start… Et l’approbation par les membres de l’UCI prouve qu’elle a un fort potentiel, car ils ne font pas les choses par hasard ! Comme nous le disions plus tôt, le Snow Bike leur permet d’être présents l’hiver sur un marché où ils sont inexistants aujourd’hui. Il faut aussi noter que, pour l’instant, très peu de nouvelles disciplines voient le jour aux JO d’hiver – contrairement à l’été – alors pourquoi pas ! Il faut se montrer ambitieux, le CIO sera peut-être ouvert à nous regarder.
A échelle nationale, nous avons la volonté aux côtés de la FFC de développer ce championnat de France. Nous avons pour l’instant un événement annuel, mais souhaitons développer à l’hiver 2022-2023 plusieurs épreuves avec une finale. L’UCI s’occupe d’internationaliser la discipline, notamment dans les pays ayant une forte culture de la montagne, comme la Suisse, l’Autriche… Le Snow Bike a de beaux jours devant lui !

Pour conclure cette interview, souhaitez-vous ajouter un mot de la fin ?

J’aimerais remercier la station de ski de Pra Loup qui joue vraiment le jeu, qui m’accompagne dans l’organisation. Merci à mes partenaires également. Ils permettent de rendre cet événement possible, notamment KEPAX qui, en plus de partager des valeurs communes de dépassement de soi, donne du crédit au projet : nous sommes dans un réseau connecté, un collectif où chacun va aider et pousser l’autre à se dépasser ! C’est toujours ce qui m’anime aujourd’hui.

Propos recueillis le 17 novembre 2021.
Inscriptions et site de l’organisateur : https://www.alpinesnowbike.com